Une lecture à ne pas rater, cher annonceur…

 
Si vous voulez notre avis, c’est l’une des études les mieux documentées et les plus pertinentes de ces dernières années ! « The billion dollar business of surveillance advertising to kids » de la New Economics Foundation. La New Economics Foundation ou NEF est un groupe de réflexion britannique qui s’est fixé pour objectif de concevoir un nouveau modèle et de nouveaux indicateurs de prospérité fondés sur l’égalité, la diversité et la stabilité. Son dernier rapport se lit comme un thriller et nous transporte de surprise en surprise, au fil des pages. L’enfant est au centre de ses recherches, mais l’étude regorge d’informations générales sur la publicité en ligne, ce qui en fait un véritable bijou.
 
 
Le contexte est clair : en 25 ans, la publicité en ligne est passée du statut de niche à celui d’élément vital pour les entreprises technologiques. Alphabet (la société mère de Google et YouTube, entre autres) en tire 84 % de ses revenus (135 milliards USD en 2020). Pour Facebook, cette part est même de 98,5 %, soit environ 70 milliards USD en 2020. La surveillance publicitaire, à savoir une publicité ciblée basée sur les données personnelles fournies par les sites web et les plateformes, existe depuis une dizaine d’années et constitue désormais la principale source de revenus des grandes entreprises technologiques.
 
Mais dans quelle mesure cette surveillance publicitaire est-elle « saine » ?
 
Ses partisans affirment qu’Internet ne peut être gratuit que grâce à cette forme de publicité. De cette façon, les éditeurs sont, en effet, payés pour la diffusion de leur contenu.
Il est toutefois clair que de sérieuses questions se posent sur la manière dont les informations sont collectées et utilisées pour alimenter les réseaux d’enchères. Les « faux » éditeurs peuvent rivaliser dans les enchères publicitaires, car la surveillance publicitaire se concentre sur les individus et pas sur les lieux, par exemple. Les agences achètent des sites web premium juste le temps de suivre le public cible. Et lorsqu’elles disposent de suffisamment de données pour le faire, elles peuvent changer de fournisseur et utiliser les informations dont elles disposent pour placer des publicités sur des sites moins chers. Que ces sites soient fiables n’a pas d’importance. L’exemple le plus affligeant de ces derniers mois a été révélé par une enquête de www.newsguardtech.com qui a montré que 4 000 marques (!) avaient annoncé sur des sites web qui diffusent toutes sortes d’inepties sur le COVID. 4 000… Dont Pfizer… Douloureux.
 
Mais la surveillance publicitaire n’offre pas non plus de valeur ajoutée pour vous, en tant qu’annonceur. PriceWaterhouseCooper a montré que 49 % de votre argent en ligne est bloqué chez des intermédiaires, tandis que vous êtes également trompé par Facebook et LinkedIn avec de fausses métriques qui gonflent l’impact de votre campagne (adage.com).
 
Les enfants sont deux fois plus touchés, selon l’étude. Ils sont, bien sûr, plus vulnérables, mais la surveillance publicitaire accentue cette vulnérabilité. Les enfants sont plus sensibles à la pression de la publicité, ne reconnaissent pratiquement aucun contenu payant et ne perçoivent pas comment leurs données personnelles sont (mal) utilisées. Avant qu’un enfant atteigne l’âge de 13 ans, l’industrie technologique a déjà collecté en moyenne 72 millions de points de données par enfant ! La folie !
 
Alors, que faire ?
 
Les premiers résultats de la mise à jour d’Apple, qui demandait aux utilisateurs s’ils souhaitaient toujours être suivis, montrent que 96 % de la population ne veut plus être suivie. Le choix délibéré d’être suivi (« opt in ») devrait être obligatoire. Les données qui ne sont pas collectées de cette manière doivent disparaître sous peine de sanctions sévères. En ce sens, il faudrait rédiger une législation mondiale qui s’applique à tous les continents.
Les partisans de la surveillance publicitaire rétorqueront qu’une telle mesure pourrait marquer la fin de l’Internet gratuit. Mais pour reprendre les bons mots du gourou du marketing Bob Hoffman : « Is advertising essential to a free web? Yes. Is tracking? No! »